Tendances et enjeux clés du marché des smart grids

By Katerina Mansour - 16 mars 2020

Traduit de l’anglais par Margaux Cervatius

Dans le monde entier, les nations investissent de plus en plus dans les efforts pour réduire les émissions de carbone et encourager des modes de vie plus respectueux de l’environnement. Le secteur de l’énergie en est le parfait exemple puisqu’il évolue vers une énergie renouvelable et verte depuis plus de dix ans.

Une des nombreuses tendances à avoir vu le jour ces dernières années est l’utilisation des smart grids. Cette technologie est loin d’être nouvelle, mais elle connaît une croissance inédite, avec un TCAM attendu de 16 % entre 2019 et 2024.

Mais qu’est-ce qu’un smart grid exactement ? Selon la définition de l’Agence internationale de l’énergie, il s’agit d’un système de réseau électrique qui, grâce à la technologie numérique, suit et gère le transport de l’électricité de toutes les sources de production pour répondre à la demande des consommateurs. Ces réseaux nouvelle génération ont une double capacité de communication, contrairement aux réseaux traditionnels, ce qui signifie qu’ils évitent plus facilement les déséquilibres entre l’énergie fournie et l’énergie utilisée. Ils peuvent coordonner les besoins et capacités de tous les acteurs énergétiques et utilisateurs finaux afin d’optimiser l’utilisation de l’électricité, avec pour conséquence la réduction des coûts et de l’impact environnemental. Grâce aux smart grids, il est désormais possible de gérer la demande, la production et le stockage d’énergie en temps réel.

Des réseaux « intelligents »

Les smart grids sont souvent loués pour leur capacité à mieux exploiter et distribuer l’énergie renouvelable (solaire, éolienne, etc.), à rendre l’utilisation de l’énergie plus fiable et sécurisée, à réduire la puissance aux heures de forte demande et à limiter l’impact environnemental des systèmes électriques.

Les technologies de détection et de mesure (permises principalement par des capteurs et systèmes IoT) des smart grids offrent des niveaux inédits de double communication entre les utilisateurs finaux et les fournisseurs d’énergie. Grâce au suivi en temps réel, un smart grid peut automatiquement détecter et résoudre tout problème, réduisant ainsi les pannes et les besoins de maintenance. En effet, les catastrophes météorologiques et naturelles comme les inondations et les cyclones se font de plus en plus fréquentes à cause du réchauffement climatique, augmentant ainsi le risque de panne d’électricité. Dans ce contexte, les smart grids deviendront essentiels pour éviter les pannes en variant et en redirigeant automatiquement l’alimentation électrique.

Les systèmes d’approvisionnement en énergie dépendent du big data pour gagner en souplesse et en efficacité, mais le hardware joue également un rôle essentiel. La startup Bl!xt, par exemple, très bien notée par Early Metrics, a créé un disjoncteur à semi-conducteurs qui peut moduler le courant plutôt que de simplement l’éteindre ou l’allumer. La société a également développé un onduleur AC / DC multidirectionnel permettant la production de panneaux solaires de petite taille à moindre coût.

Dans l’ensemble, les smart grids permettent au consommateur de reprendre le contrôle de sa consommation d’énergie et du prix qu’il paie. En effet, plutôt que de payer un montant forfaitaire, les consommateurs peuvent choisir de ne payer que ce qu’ils consomment. De plus, les utilisateurs finaux peuvent revendre tout excès d’énergie produite sur leur propriété par le biais de sources d’énergie renouvelable, comme des panneaux solaires sur leur toit. La tendance est donc à une plus grande décentralisation de la production, de la distribution et du stockage d’énergie grâce à ce nouveau type d’infrastructure.

Un des autres avantages des smart grids, et non des moindres, est qu’ils peuvent aider à augmenter l’efficacité de l’énergie renouvelable produite. Ils garantissent en effet que l’énergie sera correctement exploitée, stockée et distribuée, quelle que soit la distance séparant une ville d’un parc éolien ou solaire, ce qui réduit le gaspillage.

Des obstacles majeurs à l’adoption des smart grids

De nombreuses recherches se sont penchées sur la question de la vulnérabilité aux cyberattaques des compteurs connectés, capteurs et autres outils de communication avancés. Les compteurs connectés collectent une grande quantité de données sur les consommateurs, leur consommation, etc. Une seule faille pourrait facilement compromettre l’intégralité du système.

D’autres obstacles concernent le coût d’installation et de déploiement de ces réseaux, en plus de la granularité dans le comptage et le contrôle. Le développement d’un smart grid nécessite continuellement d’importantes ressources financières. Par exemple, au Royaume-Uni, le programme de déploiement de smart grids dans tous les foyers, évalué initialement à 11 Mds£, a été revu à la hausse en 2019 pour un coût de 13,4 Mds£ et prévoit un retard de quatre ans.

Dans un monde idéal, les smart grids seraient déployés partout et n’utiliseraient que de l’énergie renouvelable, mais dans la réalité l’énergie fossile reste une source d’électricité très répandue et beaucoup d’entreprises ne sont pas prêtes à lui dire au revoir. L’absence de mesures incitatives constitue un défi majeur dans la diffusion de l’utilisation des smart grids.

Les politiques doivent donc continuer à jouer un rôle clé pour inciter à la transition vers une énergie renouvelable et sanctionner l’utilisation de combustibles fossiles. Toutefois, cela peut se révéler complexe étant donné la position de certains politiques sur le changement climatique et le poids des lobbyistes des combustibles fossiles sur ces questions.

En effet, fin 2019, le président Trump a décidé de dissoudre le comité consultatif du NIST sur les smart grids créé par son prédécesseur Barack Obama, pour des raisons budgétaires. De plus, il a publiquement exprimé son désaccord avec les preuves scientifiques affirmant que les émissions de dioxyde de carbone sont causées par l’activité humaine, ce qui explique en partie sa décision de retirer les États-Unis de l’accord de Paris sur le climat et de nombreuses autres décisions allant à l’encontre d’une transition vers une énergie verte et renouvelable.

Les solutions des startups pour le réseau de demain

Synergies entre smart cities et smart grids

Comme on pourrait s’y attendre, de nombreuses entreprises utilisent les smart grids pour alimenter le concept en pleine expansion de smart cities. Les gouvernements et entreprises ont largement contribué à l’émergence des smart cities : le marché devrait connaître un TCAM de 18 % entre 2020 et 2025. De plus, les dépenses consacrées aux smart cities devraient augmenter de 20 % en 2020.

Early Metrics a noté de nombreuses startups dans ce secteur, parmi lesquelles Seedia, qui construit des infrastructures pour smart cities, comme des bancs et abribus, qui collectent de l’énergie de panneaux solaires intégrés pour diverses utilisations (bornes de chargement, éclairage de rue, etc.). En effet, il existe de multiples synergies entre les smart cities et les smart grids, puisque ces deux concepts impliquent de l’IoT et une énergie verte. Par exemple, à date de février 2019, les smart grids représentaient le deuxième type de projet de smart city le plus répandu parmi les projets portés par les villes françaises.

Soutien des communautés locales ou isolées

L’utilisation de ces nouveaux réseaux pour résoudre les problèmes de faible accès à l’électricité est également de plus en plus fréquente. Des startups comme SparkMeter offrent des compteurs connectés à moindre coût aux consommateurs à faibles revenus dans des pays comme le Mali, l’Inde ou l’Indonésie. En effet, de nombreuses entreprises exploitent cette nouvelle technologie pour aider à fournir l’énergie nécessaire aux pays en voie de développement.

On remarque également d’importants efforts centrés sur le consommateur, avec notamment la création de plusieurs marketplaces d’énergie locales. Lo3 Energy, par exemple, développe une plateforme pour mettre en commun les ressources énergétiques produites localement, que les consommateurs peuvent vendre ou acheter selon leurs besoins.

De nombreuses solutions appliquent également la technologie blockchain aux smart grids. Par exemple, WePower (classée parmi le top 5 % des 3 000 startups notées par Early Metrics) a développé une marketplace d’énergie verte qui s’appuie sur la technologie blockchain pour proposer des smart contracts. Elle offre également des prix concurrentiels grâce à la standardisation des processus et à l’agrégation de la demande d’énergie par les acheteurs.

Le rôle de l’IA dans les réseaux nouvelle génération

L’intelligence artificielle (IA) est évidemment une technologie au cœur des solutions de smart grids et elle a elle aussi comme but d’aider les consommateurs à mieux gérer leur consommation énergétique. Les smart grids produisent une quantité importante de données, qui peuvent être exploitées et transformées en informations précieuses grâce à l’IA. Les variables et points de données concernant des facteurs comme la météo, la demande, l’emplacement géographique ou les actifs de production aident les opérateurs à prendre des décisions sur la distribution d’énergie d’un endroit à un autre. Même au niveau des consommateurs, l’IA est essentielle pour aider les ménages à comprendre combien d’énergie chaque appareil consomme et comment ils peuvent ajuster leur consommation pour en réduire le coût.

De nombreuses startups sont entrées sur le marché sous l’élan de cette tendance de l’IA. La société Upside Energy, basée au Royaume-Uni, utilise des algorithmes automatisés pour adapter la demande à l’offre disponible et aider les réseaux à mieux gérer les fluctuations et pics d’utilisation. Du côté B2B, la startup notée Fresh Energy utilise les données des compteurs connectés et l’IA pour fournir des informations et recommandations aux consommateurs au sujet de leur consommation d’électricité.

Toutefois, les avantages valent aussi pour les entreprises. La startup canadienne BluWave développe un logiciel d’IA qui suit la consommation d’énergie pour aider à prédire la demande. La plateforme peut aider les entreprises de services publics à mieux utiliser les ressources renouvelables en leur fournissant les informations nécessaires pour déterminer la quantité d’énergie requise par une ville à un moment donné.

Dans l’ensemble, si le secteur de l’énergie reste incroyablement complexe, il est intéressant de voir la quantité d’innovation qui s’infiltre dans ce secteur grâce aux startups. Espérons que ces nouveaux acteurs aideront les autorités locales et les grands opérateurs énergétiques à accélérer l’adoption et réduire le coût des smart grids partout en Europe – et nous donneront ainsi une chance de freiner le changement climatique.

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